Est-ce qu’ils vont m’en donner à moi ? Hein ?
Oui. C’est pas inattendu, je sais, j’ai encore lu Courrier International (une addiction, somme toute, j’en suis consciente) :
Rationalisation
Les fonctionnaires britanniques ont reçu du scotch noir à coller sur leur bureau. Objectif : délimiter l’emplacement des crayons, des stylos et du téléphone. Coût de ce programme de rationalisation : 7 millions de livres (10,5 millions d’euros).
Ah, toutes ces questions qui se télescopent dans ma pauvre cervelle à grands coups de Boïnnng et de Klooonk, si fort, oui, ça fait tellement de bruit que, de les poser là, bien à plat sur l’écran devient une vraie délivrance.
Où mettent-ils les gommes ?
Ont-ils besoin de gommes ? (pas une rature, pas un repentir, même pas un gribouillis obsessionnel en poireautant au téléphone ?…)
Pourquoi du scotch noir ? (là, j’entends des voix qui s’élèvent : parce que du scotch Bob le Bricoleur ou à paillettes ça ferait pas très sérieux) Bien. Mais alors, pourquoi le noir ça fait sérieux ? Dit-on devant un basketteur noir américain « il a l’air sérieux » au lieu de « il a l’air grand, musculeux et recouvert de chaînettes en or à diamètres multiples » ?
Ont-ils du scotch d’une autre couleur (mettons bleu) pour le dossier de la chaise (poser la veste) ou pour l’assise de la chaise (poser ses fesses) ?
Cette mesure est-elle si vitale pour le fonctionnement du service (d’habitude le téléphone sonne plusieurs heures pendant que Mary ou Bryan marmonnent merde fuck j’sais pu où j’l’ai mis, l’est plus sous les frites, sous le programme télé, là où j’l’avais posé d’taleur) ?
Cette mesure est-elle prise pour contenter la femme ou l’homme de ménage ainsi à même de passer un coup de pshittpschitt l’esprit au calme (éviter une grève sauvage) ? Le pschittpschitt ne va-t-il pas décoller le scotch noir à la longue (grève sauvage à venir) ?
Vont-ils poser des étiquettes partout avec « ce que je dois savoir et retenir » (sur les poignées de porte, portes des toilettes, poubelles, collègues, chefs, peignes, photos des enfants….)
N’est-ce pas dangereux pour leur santé mentale (ouille, rentrer chez soi l’étiqueteuse à la main, prêt à coller « évier » sur l’évier, « bébé » sur le môme…etc.)
N’est-ce pas une façon détournée et subtile de nous faire comprendre que les fonctionnaires britanniques sont de grosses feignasses même pas capables de ranger leur chambres ?
Puis-je postuler ? (oui, je suis pas très rangement).
Si j’écris au gouvernement Grand Breton en illustrant ma missive de photos explicites de mon bureau, est-ce que moi aussi j’aurais du scotch ? Et combien de rouleaux ?
Cela risque-t-il de gagner notre beau pays par contagion (parce que sur les fonctionnaires, on a déjà plein de blagues toutes prêtes, celle avec la pendule et tout ça, est-ce qu’on a vraiment besoin de suppléments) ?
Mon esprit est plus clair. Me débarraser de toutes ces questions en vous les envoyant à la volée m’a considérablement assagie (thérapie, thérapie). Mais voilà. Maintenant, je vois du scotch partout. Plus question de se ronger les ongles, il va falloir entretenir ces outils pour le décoller.
Je veux pas, non, je refuse d’être rationalisée.
Kiki
2 février 2007 at 17:34
C’est tellement beau que c’est forcément vrai. Et je sens bien que c’est CA, ce qui me manque pour être pleinement productif dans mon travail (je suis très peu grand-breton, mais complétement fonctionnaire) : du scotch noir pour délimiter l’emplacement des stylos et du téléphone. Je me permettrais de suggérer de s’en servir pour matérialiser des espaces sur le bureau où seraient empilés les papiers dans l’ordre suivant : Très urgent, Urgent, Pas urgent, Trop tard.
On les attacherait ensenble à l’aide de petits accessoires métalliques vaguement évocateurs d’un instrument de musique et de ce fait nommé trombone. Puis on ôterait celui-ci avant de jeter toute cette paperasse inutile à la poubelle. Ce serait grand et magnifique.
Au lieu de quoi, la surface de mon bureau ressemble actuellement à un soir après la bataille, mais nul houssard fidèle ne vient me donner à boire. Les feuilles volent en tout sens, l’urgent se mélange à l’anecdotique, et les trombones s’éparpillent. Je suis la honte de la rationalisation. Sauf en ce qui concerne les stylos, que je range avec le plus grand soin dans des pots à confiture. Parce que même le bordel à ses limites.
2 février 2007 at 22:02
Veux-tu que je t’envoie quelques étiquettes Snoopy ? Ce serait avec plaisir.